Homélie : « Conduit par l'Esprit Saint à travers le désert, Jésus fut pendant quarante jours mis à l'épreuve par le diable »
Tentation au désert (Lc 4, 1-13)

Cette homélie a été prononcée par le
Père Guy Lecourt, prêtre du diocèse de Versailles
« Conduit par l’Esprit Saint à travers le désert, Jésus fut pendant quarante jours mis à l’épreuve par le diable ».
Les 1er Dimanche de Carême sont toujours consacrés aux « tentations » du Christ. Le Carême est en effet orienté vers Pâques, où notre être tout entier sera renouvelé par le Christ ressuscité. Il est donc un temps de préparation pour le don de la nouvelle naissance (C’est pour cette raison que les Baptêmes d’adultes se font dans la nuit pascale et que nous renouvelons les engagements de notre Baptême cette nuit-là).
Or, nous le savons, tous les jours, nous sommes affrontés à ce qui « se met en travers = diabolos » ou résiste à notre volonté d’être habité par l’Esprit d’Amour du Père. Comme pour Jésus, il ne nous sera pas épargné les « tentations » : c’est même l’Esprit-Saint qui le conduit au désert pour y être tenté. Sinon, il n’aurait pas véritablement éprouvé notre condition de « chair et de sang », d’humanité quotidiennement éprouvée.
Cependant, une remarque de vocabulaire s’impose. Dans le langage biblique, le mot « tentation » est le même que le mot « épreuve » [peirasmos].
En français, le mot « tentation » a quelque chose d’attrayant, de séduisant, sollicitant notre désir, souvent le fond trouble et caché de nous-même ; la tentation affaiblit notre liberté et met à mal notre volonté.
Le mot « épreuve » appelle au contraire à une lutte, à un combat ; l’épreuve stimule le meilleur de nous-même, renforce notre volonté, développe notre intelligence des situations, appelle notre discernement et nous donne une sensation de liberté qui nous construit. Dans les deux cas, la fidélité à nous-même, aux autres et à Dieu est en jeu.
En résumé nous pourrions dire :
« La tentation hypnotise, l’épreuve galvanise ».
Jésus est donc, comme nous-même, soumis à l’épreuve. « Ayant épuisé toutes les formes de tentations, le diable s’éloigna jusqu’au moment fixé ». Quel sera ce moment fixé ? A la Sainte Cène, où le diable entre dans le cœur de Juda, et évidemment au moment de l’Agonie, le grand combat douloureux de Jésus avant qu’Il ne se livre à ses ennemis, se donnant Lui-même jusqu’au bout et renonçant définitivement à toute tentation de puissance. Quelles sont donc « toutes les formes de tentations » ? Il y en a bien sûr trois :
- Tentation de l’AVOIR, « vivre seulement de pain », c'est-à-dire, privilégier la possession de biens plutôt que chercher à ÊTRE. ÊTRE c'est-à-dire, développer tout ce qui nous met en relation avec les autres et avec Dieu qui nous façonne dans la liberté et l’amour par sa Parole, comme le dit le Deutéronome au chapitre 8,3.
- Tentation du POUVOIR, « avoir tout pouvoir et la gloire des royaumes », c'est-à-dire, dominer tous les êtres… ce que Dieu Lui-même refuse de faire, nous aimant là encore, dans la liberté de l’amour.
- Tentation de METTRE DIEU AU DÉFI, s’en prendre à Dieu : « Si Dieu existait, Il n’aurait pas permis… ». On connaît le refrain de tous les pauvres égarés du vrai Dieu qui ne cherchent précisément qu’un dieu tout-puissant suppléant leurs manques, ce qui est bien naturel et nous guette aussi ! Mais Dieu n’est qu’Amour, un Amour infini, qui exauce à sa manière, bien au-delà de ce que nous avons demandé, même si c’est par des chemins déroutants, comme l’a été le chemin de son Fils, de l’Agonie à la Résurrection.
Gardons à l’esprit ces trois formes de tentation, mais accueillons-les comme des épreuves. Comment Jésus a-t-Il tenu face à ses épreuves ? Par sa prière, uni à son Père, et par la Parole de son Père. Nous savons que Dieu nous accompagne toujours : restons le plus possible en communion avec Lui.
AMEN !