Homélie : Et nous, sommes-nous à la recherche du Roi ?
La visite des Mages (Mt 2, 1-12)

Cette homélie a été prononcée par le
Père Guy Lecourt, prêtre du diocèse de Versailles
Épiphanie = Manifestation de Jésus reconnu comme Dieu par des païens, après que les fils d’Israël, les bergers et le voisinage soient venus l’adorer.
Sans doute faut-il voir dans ce récit de St Matthieu l’accomplissement d’un oracle très ancien mentionnant un astre qu’un mage païen, Balaam, venu d’Orient, inspiré par le Dieu d’Israël, avait prononcé sur le peuple hébreu lors de son Exode vers la Terre Promise. Voici cet oracle.
« Oracle de Balaam, fils de Béor, oracle de l’homme au regard pénétrant, oracle de celui qui écoute les paroles de Dieu, de celui qui sait la science du Très-Haut : il voit ce que Dieu fait voir, il obtient la réponse divine et ses yeux s’ouvrent. Je le vois, mais non pour maintenant, je l’aperçois, mais non de près : un astre issu de Jacob devient chef, un sceptre se lève, issu d’Israël » Livre des Nombres ch.24, verset 17.
Toujours est-il que nos mages, païens certes, érudits de l’époque, cherchent un roi, dont la naissance a été manifestée par un astre. C’est tellement important pour eux, qui possèdent déjà beaucoup de savoir, qu’ils se sont mis en route depuis loin et sans doute longtemps. Mais ils ont perdu la trace de l’étoile et humblement, ils se renseignent en s’adressant à ceux qui détiennent un autre savoir qu’ils n’ont pas : celui de la Révélation de Dieu contenue dans les Écritures.
Cela me fait penser à quelques contemporains que je connais, qui sont très cultivés dans leur domaine et sont avides de savoir, mais totalement ignorant de la foi chrétienne et surtout biblique. Ils interrogent et écoutent avec beaucoup d’intérêt ; provoquent des échanges et même font signe à d’autres personnes pour chercher ensemble. Pourrons-nous répondre à leur question : « Où est le roi des juifs ? » si nous-mêmes ne partageons pas leurs interrogations et leurs recherches, si nous-mêmes n’apprenons pas ?
Dans ce récit, les mages rencontrent bien des érudits qui savent, mais leur connaissance est morte : elle ne les met pas en marche vers autre chose qu’eux-mêmes et leur savoir suffisant. Croire n’est pas seulement savoir, mais grâce à ce savoir, faire la place pour Celui qui se dit, se révèle, et vivre une alliance quotidienne avec Lui. Les mages avaient prévu cet espace pour accueillir le roi qu’ils cherchaient. Et qu’ont-ils trouvé ? Un enfant et sa mère, un petit d’homme, vulnérable, mais manifestation de ce que Dieu a donné de plus précieux à sa création : l’homme, roi de l’univers. Non pas un roi inquiet et rongé par son désir de toute-puissance, comme l’était le sanguinaire Hérode le Grand (dont l’histoire nous apprend qu’il avait assassiné ses enfants, sa femme et d’autres membres de son entourage par peur d’être renversé de son trône). Mais un roi qui fait appel à chacun comme s’il en dépendait…Et ce roi est Fils de Dieu ! C’est bien ainsi qu’ils l’ont compris, Lui offrant l’or et l’encens, symboles de royauté et de divinité.
Voici donc l’Épiphanie, la manifestation de Dieu aux mages : elle révèle la façon dont Dieu entend exercer son pouvoir. En Jésus, Dieu se fait humble et vulnérable et le sera jusqu’à la fin de sa vie : c’est le symbole de la myrrhe pour l’ensevelissement de Jésus. Il montre ainsi à toute personne qui laisse un espace pour les autres que la vraie puissance, c’est bien celle-là qui fait naître le respect, la vie, l’amour : j’existe, tu existes ; je te reconnais, tu me reconnais, et une relation, un partage, une amitié et même un amour s’installe qui donnent vie, énergie, joie.
Ils partirent par un autre chemin, celui du vrai roi, laissant le roi Hérode à ses tristes desseins. Suivons-les !
AMEN !