Homélie : Jésus-Eucharistie, vraie nourriture de la foule affamée
La multiplication des pains (Jn 6, 1-15)

Cette homélie a été prononcée par le
Père Guy Lecourt, prêtre du diocèse de Versailles
Connaissez-vous un personnage de la Bible qui a accompli de grands signes ; qui a passé la Mer, suivi d’une grande foule, qu’il conduit au désert ; qui gravit la montagne et s’assit pour enseigner un peuple, rassemblé par “cent” et par “cinquante” (cinq mille hommes) ; où il est question de la Pâque (sortie d’Égypte) et de pain donné en abondance, la Manne …Vous l’avez tous deviné : Moïse !
Jésus, nouveau Moïse ? Plus que cela : Jésus en effet va combler une faim à la fois matérielle et spirituelle, à la manière d’Élisée (2R 4,42-44), mais en bien plus important ; Il offre sur une montagne un festin, comme l’annonçait Isaïe : « Le Seigneur le tout-puissant va donner sur cette montagne un festin pour tous les peuples… » (Is 25, 6), Lui le Bon Berger qui les a conduit sur des verts pâturages (Ps 23) (N’y avait-il pas beaucoup d’herbe à cet endroit-là ?) Il prend donc les pains, rend grâce, les distribue (n’est-ce pas déjà la Sainte Cène et nos eucharisties préfigurées : seulement, Il n’a pas encore pu livrer son Corps, verser son Sang). Ils mangèrent tous à leur faim, comme pour la manne : mais là encore, différence, car Il demande que “l’on ramasse les morceaux afin que rien ne soit perdu” : Les Pères de l’Église ne sont pas sans penser que ces douze paniers, faisant allusion aux Douze tribus du peuple de Dieu mais aussi aux douze Apôtres du nouveau peuple de Dieu, sont comme l’annonce du pain eucharistié, confié à l’Église fondée sur les douze Apôtres. Le désir de Jésus est que nous dépassions le seul temps historique de ce signe merveilleux car ce pain deviendra définitivement le signe du Corps ressuscité du Christ, pain qui sera porté aux chrétiens prisonniers et aux malades dès les premiers temps de l’Église.
Nous sommes invités à porter, par le témoignage de notre vie, Celui que nous recevons à chaque Eucharistie.
La foule prend conscience qu’elle a devant elle un homme tout à fait extraordinaire qui est plus qu’un maître à penser, plus qu’un guérisseur : Il est vraiment le Prophète annoncé par ce même Moïse : « Yahvé ton Dieu suscitera pour toi, du milieu de toi parmi tes frères, un prophète comme moi que vous écouterez » (Dt 18,18). Mais elle se trompe de mission pour ce prophète : elle veut en faire un roi, bon, puissant, juste, libérateur et guerrier ! Ce n’est pas ce que Jésus a voulu leur faire comprendre, et pourtant, Il les avait beaucoup enseignés ! (Çà peut nous consoler quand nous ne comprenons pas tout de suite ce que Dieu attend de nous !). Non ! La vraie nourriture de cette foule affamée, prototype de tous les peuples du monde, ce n’est pas le pain et la puissance terrestre, c’est quelqu’un qui se donnera à tous : Jésus tentera de le faire comprendre sans se lasser dans le discours qu’Il fera à cette même foule à Capharnaüm dans la suite de cet Évangile de Jean au chapitre 6.
Jésus donc se retire seul dans la montagne, à la rencontre de son Père, comme tous les grands spirituels de la Bible : Moïse, Élie au Sinaï.
Nous savons que Jésus nous propose un autre type de Règne ; nous savons qu’il est Dieu Lui-même se donnant à nous pour que nous soyons nourris de la Vie du Royaume ; croyons-nous en ce Dieu ? Retirons-nous un moment sur la montagne ou au fond de notre chambre pour y rencontrer le Père qui est là dans le secret et qui nous parle de son Règne. Approchons-nous du Fils qui se donne à nous, Pain pour la Vie éternelle ; qu’Il nous remplisse de l’Esprit-Saint pour qu’à notre tour, nous puissions nous donner à Lui et à nos frères qui ont faim : ce sera le signe du Règne qui vient.
AMEN !