Homélie : En Jésus, passer de ce monde "abîmé" au monde voulu par Dieu
La Résurrection du Christ (Mt 28, 1-10)

Cette homélie a été prononcée par le
Père Guy Lecourt, prêtre du diocèse de Versailles
Avant que nous renouvelions les engagements de notre Baptême, les textes des Saintes Écritures qui nous ont été donnés en cette nuit pascale nous invitent à entrer dans le dessein merveilleux de Dieu à notre égard. Reprenons les étapes qu’ils nous ont fait parcourir.
En présentant les origines du monde, l’auteur sacré nous fait découvrir que les œuvres de Dieu sont belles et très bonnes, et tout particulièrement l’homme et la femme créés à son image et ressemblance (Gn 1, 31) : tout simplement, parce que le Créateur a créé par Amour. Et pourtant, nous sommes quotidiennement témoins, souvent impuissants, de ce que ce monde est saboté : ce qui devrait être n’est pas, ou n’est plus : dans la nature et ses phénomènes destructeurs ; dans nos corps avec ses maladies, certaines incurables, et ses handicaps ; dans nos psychismes aux mécanismes détraqués ; dans nos consciences perverties ; dans nos cœurs orgueilleux aux pulsions de violence ou d’égoïsme, voire d’insensibilité.
Alors Dieu ne se résigne pas à laisser ses créatures victimes de ces sabotages que l’on désigne par l’esprit du mal. Il libère son peuple de l’esclavage et lui fait passer les eaux de la mort qui auraient pu lui être fatales (Ex 14, 30), pour le conduire, non sans épreuves, vers une Terre donnée “ où ruissellent le lait et le miel ”.
Une fois installé sur cette Terre, le peuple n’est pas fidèle aux recommandations que le Seigneur a données à Moïse au Sinaï. Il va donc le conduire à apprendre la Sagesse et à observer les préceptes de vie (Ba 3, 9). Il va lui faire connaître ses pensées, bien au-dessus de ses pensées toutes humaines (Is 55, 8).
Mais cela n’a pas encore suffit et Dieu Lui-même est venu nous rejoindre en la personne de son Fils bien-aimé. Il enseignera à son tour, libèrera les malades et les pécheurs, et plus encore, prendra sur Lui le poids de souffrance de notre pauvre humanité, subira son aveuglement, sa lâcheté, sa violence et ne lui opposera que son amour. Il sera détruit par la mort. Mais dans le même temps où la mort semble avoir le dernier mot, elle est dépassée, car elle ne peut plus rien d’autre sur Celui qui n’est qu’Amour.
L’Évangile évoque les signes qui marquent cet évènement et secouent le monde : un grand séisme qui panique les gardes du tombeau ; puis vient l’envoyé de Dieu, dont l’aspect était comme l’éclair et le vêtement blanc comme la neige, manifestant qu’il est bien l’envoyé de Dieu ; il roule la pierre tombale et s’assit dessus. Il indique aux femmes un tombeau vide. Il reprend des paroles qui donnent le sens de l’évènement : le “crucifié”, le mort par amour, est vivant comme Il l’avait annoncé ! Enfin, une mission est confiée à ces femmes fidèles parmi les fidèles : porter cette Bonne Nouvelle aux Apôtres pour qu’ils la proclament au monde entier. La rencontre avec Jésus, le “crucifié” confirme le dire de l’ange et la mission qui leur a été donnée.
Résumons cette Bonne Nouvelle. Il y a dorénavant un homme, issu de notre humanité blessée, fidèle au Dieu d’Amour jusqu’au bout, qui s’est “réveillé d’entre les morts”, (Egertè “Hgerqh”), entré dans le Royaume de Son Père, car Il est Fils, le Fils premier-né de la multitude de ceux qui l’accueillent et veulent vivre à sa manière, animés par l’Esprit d’Amour du Père. Il les appelle à être ses filles et ses fils bien-aimés. Il les plonge, les baptise dans les eaux de la mort au péché pour les faire naître à une vie nouvelle comme la sienne. Le Baptême est le signe qui engage Dieu Lui-même dans notre Histoire Sainte personnelle. Dans la mesure où nous faisons tout pour l’accueillir et pour vivre en communion avec Lui, nous préparons notre Pâque, passage de notre mort à notre résurrection, de ce monde abîmé au monde voulu selon les pensées de Dieu. Ce monde est le Royaume des cieux que Jésus a inauguré dans la nuit pascale, bâti sur la communion avec Lui et entre nous, et qui continue de se construire aujourd’hui. Frères et sœurs, voulez-vous participer à sa construction, combattre tout ce qui fait tant pleurer près de chez nous et jusqu’au bout de la terre, et vous unir à Celui qui nous as choisis et aimés avant même la fondation du monde ? (Ep 1, 4)
AMEN !