Homélie : La déchirure du Ciel
Le baptême du Seigneur (Mc 1, 7-11)

Cette homélie a été prononcée par le
Père Guy Lecourt, prêtre du diocèse de Versailles
« Jésus vit le ciel se déchirer et l’Esprit descendre sur Lui comme une colombe » Mc 1, 10. Voici que s’accomplit le cri lancé par le prophète Isaïe en pleine captivité à Babylone : « Ah, si tu déchirais les cieux et si tu descendais… » Is 63, 19.
Comment ne pas entendre les cris de milliers hommes qui souffrent ?
Au cœur de ces tragédies, croire et espérer en un Dieu qui ne nous abandonne pas, tel est le défi que relève le prophète et qu’annonce le Baptême de Jésus.
Tout d’abord, il nous fait comprendre que les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées, que ses chemins ne sont pas les nôtres et que cependant sa Parole est efficace « comme la pluie ou la neige qui descendent des cieux n’y retournant pas sans avoir abreuvé la terre… » Is 55, 10. Par quels chemins la Paix et la justice reviendront là où elles ont déserté ? Il en faudra du temps et des tentatives pour que le cœur des hommes change sans que Dieu ait attenté à leur liberté !
En se faisant baptiser par Jean, Jésus, épouse notre humanité malade, souffrante et loin des chemins de son Père. Il vient “aider les fils d’Abraham” et “devient en tout semblable à ses frères” (Ph 2,7). Il signifie, par cette démarche, que Dieu peut guérir et redonner pleinement vie, « Lui qui est riche en pardon » (Is 55, 9).
L’Esprit, qui pourtant en tant que Dieu Lui est parfaitement uni, descend alors sur Lui, dans son humanité, afin que tous puissent Le recevoir et réalise la Parole du prophète Joël : « En ces jours-là, je répandrai de mon Esprit sur toute chair » (Jl 2, 28). Et le premier fruit qu’apporte l’Esprit, c’est la Paix, signifiée par la colombe que voit Jésus et qui rappelle celle qui revint vers Noé, tenant en son bec un rameau d’olivier (Gn 8, 11) : Dieu n’allait-Il pas alors faire avec toute l’humanité une nouvelle création, scellée par une alliance “d’arc en ciel” avec tout l’univers ?
Ne rêvons pas : gagner la Paix a un coût. Faire régner la justice ; partager (Le cinéaste Claude Lelouch disait : « Il faudra passer d’un partage du monde à un monde de partage ». Comme cette vision de l’avenir est actuelle et urgente !) ; vivre plus simplement (« Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas ? » Is 55, 2).
Ce coût passe par notre générosité et notre désir d’entrer dans les pensées et les chemins de Dieu. Jésus nous les a montrés et Il a été jusqu’à passer par un autre Baptême, celui de l’Esprit-Saint donné en son dernier souffle sur la Croix, puis aux Apôtres au soir de Pâques et à toutes les nations à Pentecôte.
« Ce qui nous fait vaincre le monde loin de Dieu, c’est notre foi » nous rappelle St Jean dans la lettre d’aujourd’hui.
Que le Baptême de Jésus, que nous célébrons aujourd’hui, nous rende solidaire comme Lui de tout frère en humanité, pécheresse mais sauvée et aimée, comme autant “de filles et fils bien-aimés”, pouvant vivre dès à présent de l’Esprit Saint par notre Baptême.
Rendons-Lui grâce et bénissons-Le.
AMEN !