Homélie : Contempler le côté ouvert de Jésus
La mort de Jésus (Jn 19, 31-37)

Cette homélie a été prononcée par le
Père Guy Lecourt, prêtre du diocèse de Versailles
La Fête du Sacré-Cœur de Jésus prend son origine dans le très beau texte de l’Évangile de St Jean que nous venons de proclamer. Pourquoi est-il le seul à relater le percement du côté du Christ sur la Croix alors que Celui-ci venait d’expirer ?
St Jean lui-même en donne une raison : l’accomplissement des Écritures authentifiant la mission du Christ et sa mort, approuvée par Dieu, alors même qu’elle restait pour tous le signe évident que Dieu l’avait abandonné. « Aucun de ses os ne sera brisé » : composition du Ps 34, 21 et d’Exode 12, 46. Et l’autre citation biblique : « Ils regarderont vers celui qu’ils ont transpercé » Zacharie 12, 10.
Une deuxième raison porte sur la réalité de la mort de Jésus. Pour les juifs, le corps de l’homme est constitué de sang et d’eau : l’effusion de ces deux éléments dit bien que Jésus est mort. Et donc, sa résurrection n’est pas un retour à la vie, mais bien l’entrée dans une nouvelle vie.
Une autre raison, propre à St Jean, manifeste le don de l’Esprit-Saint, comme au Baptême : Eau et Esprit sont intimement liés « Nul s’il ne naît d’eau et d’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu » (Jn 3, 5) cf. aussi Jn 7, 38-39 et 1 Jn 5, 6-8.
D’autres encore interprètent le fait en y voyant un sens symbolique : l’eau, le Baptême ; le sang, l’Eucharistie.
Enfin, et pour m’arrêter là, d’autres y voient la naissance de l’Église : du côté de Jésus, le Nouvel Adam, naît l’Église, la nouvelle Eve.
Nous voyons combien la réalité de ce récit peut receler de richesse et il n’est pas surprenant que dès le XIIIème siècle, la contemplation de ce passage de la Passion et de la Mort du Sauveur ait suscité un profond mouvement envers le Cœur ouvert à l’infini de Notre Seigneur.
Ce mouvement spirituel prit de l’ampleur grâce à St Jean Eudes dès le 20 Octobre 1672, première fête liturgique de cœur de Jésus ; puis il fut relayé par une religieuse visitandine de Paray-le-Monial, Ste Marguerite Marie Alacoque, à qui Jésus apparut en 1673 et 1675, lui montrant Son Cœur. C’est elle qui introduisit l’expression « Sacré-Cœur ».
Dans le langage biblique, le cœur désigne la personne humaine tout entière, évoquant davantage l’intelligence, la mémoire, la volonté et même le courage. Pour Ste Marguerite-Marie, le cœur de Jésus, c’est l’amour infini, mystérieux dont Dieu nous aime ainsi que le don par lequel cet amour devient nôtre. Pour elle et ses successeurs, « l’amour n’était pas aimé » et il fallait réparer ce manque par une dévotion plus grande envers Jésus.
Le culte du Sacré-Cœur sera approuvé par Clément XIII en 1765, presque cent ans après, et célébré le Vendredi qui suit la Fête du Corps et du Sang du Christ, ou Fête-Dieu. Léon XIII consacra le monde au Sacré-Cœur de Jésus en 1899. Aujourd’hui, après un temps de désaffection, son culte connaît un renouveau, tout particulièrement autour des sanctuaires de Montmartre et de Paray-le-Monial, mais aussi, sous une forme nouvelle, dans la dévotion à la Miséricorde divine, que Sr Faustine, décédée en 1938 à 33 ans, exprimé et qui se développe dans le monde entier, en particulier à Rambouillet dans le groupe de prière qui porte son nom.
Que la contemplation du côté ouvert de Jésus, en nous faisant puiser à la source du don de l’Esprit-Saint, reçu à notre Baptême et notre Confirmation, ainsi que dans le Pain de la Parole et dans le Pain de Vie accueillis dans l’Eucharistie, fasse, comme l’exprimait si bien St Paul, « … grandir en nous l’homme intérieur en sorte que le Christ habite dans nos cœurs par la foi, pour que nous soyons enracinés et fondés dans l’amour… ». Ep 3, 16-17
AMEN !