Catéchèse : Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme

Célébrer Jésus-Christ vrai Dieu et vrai homme en la fête de Noël, c’est en définitive poser la grande question de notre vie : qu’est-ce qu’un homme véritable ? Comment trouve-t-il son unité ? Quel est le point culminant de sa liberté ?

Célébrer Jésus-Christ vrai Dieu et vrai homme en la fête de Noël, c’est en définitive poser la grande question de notre vie : qu’est-ce qu’un homme véritable ? Comment trouve-t-il son unité ? Quel est le point culminant de sa liberté ?
Toutes ces questions ont été longuement approfondies au cours de l’histoire de l’Eglise, au prix parfois d’affrontement difficiles. Ainsi, au VIIème siècle, Saint Maxime le Confesseur (580-662) accepta avec un courage intrépide le supplice et l’exil pour témoigner de sa foi en l’Homme-Dieu, le Sauveur du monde. Il ne tolérait aucune réduction de l’humanité du Christ.
Dans cette catéchèse, le Saint Père Benoît XVI montre combien ces réflexions restent d’une actualité saisissante pour nous aujourd’hui.
Saint Maxime le Confesseur
« Une théorie était née selon laquelle dans le Christ il n'y avait qu'une volonté, la volonté divine. Pour défendre l'unicité de sa personne, on niait en lui une véritable volonté humaine qui lui fût propre. Et, à première vue, cela pouvait sembler une bonne chose qu'il en fût ainsi, que dans le Christ il n'ait qu'une seule volonté.

Mais saint Maxime comprit immédiatement que cela réduirait à néant le mystère du salut, parce qu'une humanité sans volonté, un homme sans volonté, n'est pas véritablement un homme, c'est un homme amputé. Donc l'homme Jésus-Christ n'aurait pas été véritablement un homme, il n'aurait pas vécu le drame de l'être humain, qui consiste justement dans la difficulté de conformer notre volonté avec la vérité de l'être.
Et ainsi saint Maxime affirme avec grande détermination : la Sainte Écriture ne nous montre pas un homme amputé, sans volonté, mais un homme complet ; Dieu en Jésus-Christ a réellement assumé la totalité de l'être humain, à l'exception évidente du péché, et donc également une volonté humaine.
Les choses dites ainsi paraissent claires : ou bien le Christ est homme ou bien il ne l'est pas. S'il est homme, il a naturellement une volonté humaine. Mais surgit alors le problème : n'aboutit-on pas ainsi à une sorte de dualisme ? N'en arrive-t-on pas à reconnaître deux personnalités complètes : raison, volonté, sentiment ? Comment surmonter le dualisme, conserver la totalité de l'être humain et cependant affirmer l'unité de la personne du Christ qui n'était pas schizophrène ?

Et saint Maxime démontre que l'homme trouve son unité, l'intégration de lui-même, sa totalité, non pas en s'enfermant sur lui-même, mais en se dépassant, en sortant de lui-même. Ainsi, de même dans le Christ, sortant de soi-même, c'est en Dieu, dans le Fils de Dieu, que l'humanité se trouve elle-même. Il n'est nullement besoin d'amputer l'homme pour expliquer l'Incarnation : il suffit seulement de comprendre le dynamisme de l'être humain qui ne se réalise qu'en sortant de soi ; ce n'est qu'en Dieu que nous nous trouvons nous-mêmes, que nous nous trouvons en totalité et en plénitude. On voit bien que ce n'est pas celui qui se renferme sur lui-même qui est un homme complet, mais c'est l'homme qui s'ouvre et qui sort de lui-même, qui devient complet et trouve lui-même sa véritable humanité précisément dans le Fils de Dieu.

Pour saint Maxime, une telle vision ne s'arrête pas au stade de la spéculation philosophique ; il en voit la réalisation dans la vie concrète de Jésus, avant tout dans le drame de Gethsémani. Dans ce drame de l'agonie de Jésus, de l'angoisse de la mort, de l'opposition entre la volonté humaine de ne pas mourir et la volonté divine qui s'offre à la mort, dans ce drame de Gethsémani, se réalise tout le drame humain, le drame de notre rédemption. Saint Maxime nous dit, et nous savons bien que cela est exact : Adam, et Adam c'est nous, pensait que le non fût le point culminant de la liberté. Il n'y aurait que celui qui est capable de dire «non» qui serait réellement libre ; pour réaliser réellement sa liberté, l'homme doit dire «non» à Dieu ; de la sorte seulement pense-t-il être finalement lui-même, être arrivé au summum de la liberté. Cette tendance, la nature humaine du Christ la portait aussi en elle, mais Jésus l'a surmontée parce qu'il voyait que ce n'est pas le non qui est le maximum de la liberté. Le maximum de la liberté c'est le oui, la conformité avec la volonté de Dieu.

L'homme ne devient réellement lui-même que dans le oui : ce n'est que dans la grande ouverture du oui, dans l'unification de sa volonté avec la volonté divine que l'homme s'ouvre immensément, qu'il devient « divin ». Être comme Dieu, voilà ce que désirait Adam, c'est-à-dire, être complètement libre. Mais il n'est pas divin, il n'est pas complètement libre l'homme qui se referme sur lui-même ; il l'est en sortant de lui-même, c'est dans le oui qu'il devient libre ; c'est là que se situe le drame de Gethsémani : non pas ma volonté, mais la tienne. C'est en transférant la volonté humaine dans la volonté divine que naît l'homme véritable et que nous sommes rachetés.
Tel est, exprimé brièvement, le point central de ce que voulait dire saint Maxime, et là nous constatons que tout l'être humain est en question ; là se situe toute la question de notre vie. »
« Père, toi qui a merveilleusement créé l’homme
et plus merveilleusement encore rétabli sa dignité, Fais-nous participer à la divinité de ton Fils Qui a voulu prendre notre humanité. » (Oraison du jour de Noël) |